Textes sur les oeuvres de Michèle Barange

 

Alchimie du noir

 
« La vie d’une toile, sa force, sa richesse, c’est la richesse des forces contradictoires qui l’ont fait naître. » – Jean Bazaine
  C’est à quelques pas de la Place de Bretagne, dans la vieille épicerie de son enfance que Michèle Barange a installé son atelier. C’est dans ce lieu, encore bruissant de souvenirs, réfugié dans ces coulisses urbaines, accosté par une Vilaine fugitive, qu’elle compose une œuvre qui s’affirme d’année en année. Si le doute demeure, il constitue un adjuvant salutaire, car il invite l’artiste à s’interroger sans cesse sur son travail, qui déhale vers des espaces insoupçonnés. Sa démarche s’apparente ainsi à un nomadisme formel. « Allez au plus profond de soi et au plus loin dehors », écrit Antoine Emaz, « la poésie reste pour moi la parole la plus apte à avancer encore, dans le noir », poursuit-il. Cette réflexion peut s’appliquer à Michèle Barange, dont la peinture joue de cette proximité et de cet éloignement. Elle est un moyen de se découvrir en creusant le noir qui motive sa démarche et de s’aventurer dans un paysage recadastré, tout en recherchant l’altérité et la communion avec l’autre. La blancheur de la toile n’a pas l’attrait mimétique de la neige ou de l’écume pour le peintre. Au contraire, elle représente un espace tyrannique qui impose ses vertiges et tétanise tout élan créateur. Aussi l’artiste pour conjurer cette présence inquiétante du blanc la recouvre d’un fond noir, congédiant ainsi toute lumière. Et c’est de cette nuit qu’elle s’impose que va naître l’œuvre. Le peintre va embraser son ciel nocturne de ses couleurs ardentes, qui la réconcilient avec cette intranquillité initiale, la nuit s’éloignant peu à peu sous leur harcèlement. Le geste et le désir s’unissent pour ébaucher les seuils de l’œuvre, communiant avec ces couleurs qui jubilent. Ce rituel inaugural serait comme un stratagème devant une inspiration volage, ou coïnciderait avec l’attitude du phénix, car rien pour Michèle Barange n’est acquis, tout est à recommencer. Mais cette appréhension est salutaire, car elle impose à l’artiste de se mesurer à l’épreuve de la toile, à interroger les aspérités du noir pour apprivoiser la lumière. Elle va ainsi jusqu’à l’exhaustion de ses émotions, guidée parfois par une intuition qui métamorphose alors ses doutes en formes inattendues et en un univers solaire. Les premières notes de couleurs brûlent ainsi l’opacité nocturne et leur embrassement libère le désir audacieux de créer, fait germer l’aventureux appel des profondeurs, comme si Michèle Barange hissait soudain un univers enfoui sous ce noir pour l’amener à un degré de transparence et de fluidité gagnées. Mais la nuit demeure inusable. Des lambeaux d’ombre s’égarent ici et là dans la densité lumineuse des couleurs métissées sous la migration du pinceau. Ils contredisent l’oubli de la nuit. Ils sont les reliefs tenaces de cette nuit qui refuserait de déserter la scène où s’est joué l’acte primordial. Ces failles d’ombre soulignent la présence chtonienne, les échos ou les vestiges de cette efflorescence chromatique. Ces traces qui affleurent se retrouvent dans d’autres œuvres de Michèle Barange qui pratique souvent l’art du recouvrement. L’artiste n’hésite pas en effet à sacrifier des toiles plus anciennes, illustrant ainsi le propos de Giacometti : « Je ne fais qu’en défaisant ». De ses œuvres nouvelles s’exondent les strates des peintures anciennes. Le tableau esquisse alors un rapport mémoriel où le passé n’est pas complètement aboli et flirte avec les signes, les scarifications d’un présent, car Michèle Barrage lacère la toile, la creuse à la manière du graveur, comme pour tourmenter le silence de sa surface, toucher la nuit des abysses et lui dérober l’intensité de sa lumière. Ainsi ses tableaux-palympsestes conjuguent deux temporalités, l’une sous-jacente, legs de l’œuvre ancienne et l’autre écorchée par les tensions du monde. On n’entre pas dans l’œuvre de Michèle Barange par effraction, même si parfois on devine des influences qui conditionnent notre regard et le rassure. Malgré une filiation avec l’abstraction lyrique, l’artiste privilégie le paysage. Celui-ci s’ordonne dans l’équilibre turbulent des couleurs. Elle le réinvente en permanence, déjouant ainsi les pièges de sa représentation attendue. Il se situe aux frontières d’un réel revisité et de l’abstraction. Il émerge d’une chorégraphie de l’acrylique et l’huile et des effets impromptus que leur complicité provoque. Ainsi couleurs, plis, coulures et coutures d’ombre s’accordent pour suggérer un univers terraqué et minéral, où l’on devine une lisière d’arbres, un escarpement scabieux, un mur écaillé par la tendresse des pluies, un horizon évanescent dans le mouvement saccadé des nuances, avec parfois un rose audacieux, comme échoué au milieu du tableau et qui pourrait troubler la vue, si n’intensifiait pas les ocres et les rouges environnants. Si l’artiste désamorce l’autorité du blanc, le lieu exerce aussi son influence et dicte ses exigences. La grandeur de son atelier lui permet de réaliser de grandes toiles, mais aussi de peindre des séries gigognes. Ces dernières font songer un peu aux ricochets d’une pierre sur l’eau quand ses ocelles s’élargissent au fil de sa course. Chaque toile s’allégeant un peu plus de l’intensité chromatique de la première tout en se déhalant de la forme initiale dans le jeu des interférences. Ces variations illustrent bien l’obstination de l’artiste à interpeller toujours plus la matière. Habituée au grand format carré, elle a créé récemment de grandes toiles rectangulaires en fonction de son nouveau lieu d’exposition, car l’œuvre fait sens par rapport à l’espace qui l’accueille. Ces formats impliquent une relation évidente au corps, à ce corps à corps que l’artiste recherche, afin que le tableau révèle toute son énergie. Merleau-Ponty n’écrit-il pas que : « c’est en prêtant son corps au monde que le peintre change ce monde en peinture ». Avec ses grands oeuvres rectangulaires le corps du spectateur est mis à son tour à l’épreuve. Il ne peut esquiver ce rapport de forces avec la peinture. Michèle Barange l’invite ainsi comme l’écrit Victor Segalen : « à voir seulement « et de « tout oublier à l’entour ». En conjuguant les contrastes, le noir comme auxiliaire de la lumière, l’acrylique comme une urgence face à la matérialité temporelle de l’huile, la violence du geste pour saisir une sérénité, le signe ou ses avatars pour inscrire davantage dans la chair de l’œuvre une vibration, une histoire, l’abstraction pour mieux redéfinir le paysage qui se recompose dans l’imaginaire du spectateur, Michèle Barange révèle l’intranquillité d’une œuvre qui tend à cerner des « florides » et à s’approcher un peu plus de son soleil intérieur.
– Alain Le Beuze      
 

Rose d’après nature Sur la peinture de Michèle Barange

 
– Philippe Gouët, avril 2010
  Sans la main du peintre nous n’aurions pas eu vent de ce qui échappe à la monotonie des géométries quotidiennes. Humide et brillante, elle lisse le phrasé répétitif des petites pensées journalières. Elle déroute l’incise noire et blanche de la fatigue et des travaux, et fait trembler le décalque mental des échafauds calligraphiques. Nous voici restitués à l’oubli, et donc à la mémoire de ces infimes instants où nous pressentions l’échappée fulgurante d’une présence, d’une joie cachée, sous le voile des images et des mots. Nous voici allégés de tous les signes, invités au glissement vers la couleur. Le geste du peintre s’installe dans la ponctuation, là où notre regard ne saisit que les points de suspension. D’un point à l’autre, d’une couleur à l’autre, une aube se précise, une lumière en amont du désir : celle que l’on entrevoit en fermant les yeux sur le monde pour le retrouver. Nous voici assignés à la couleur comme en une résidence dont la beauté délivre le secret de la naissance du jour.        

Plages de vie Sur les peintures de Michèle Barange

 
– Yves Bergeret, 1er février 2010
 

Plages de vie : ainsi sont les nouvelles peintures de Michèle Barange. Plages de vie humaine. Si l’on prend le temps de les regarder, une foule d’événements les constitue. On y voit très nettement le travail au long cours, dans la lenteur des temps de préparation, d’apposition puis de séchage des couches de la peinture en premier acrylique puis à l’huile, tout ce travail au long cours qui a peu à peu fait de l’œuvre ce que maintenant elle est.

Et voici que la perception se ralentit encore : voici qu’elle s’ouvre à toute une histoire. Car la matière est si dense et si riche qu’elle constitue une géologie sédimentaire. Du temps rendu clairement visible. Des heures et des jours et des semaines de dépôts, d’érosion, de gésine, d’écorchement et de nouveaux dépôts. D’érosion. Et curieusement rien ne pèse : parce qu’un rite habite cette matière et la met en respiration. Je ralentis encore mon regard et ma perception. Je m’approche de la toile pour mieux la voir. Et ainsi me trouvé-je plus près d’un sol : je vois ses vallées, ses ravins, ses menues falaises et ses failles, ses coulures de boue ici figée, ses sables étirés là, ses argiles étalées et délaissées. Je vois ce grand geste de la main qui les brasse et les trace, qui les pose et les relève et les dépose encore, ce grand geste des doigts, ou ici de la brosse, là du couteau. Je vois ce beau labeur de vivre, cette caresse de la tendresse et de la souffrance. Je vois ce besoin de toucher, de palper, d’éprouver ; je sens cette intention d’atteindre dans la matière un au delà de la matière ; ce besoin insistant, lucide et jamais découragé, presque cérémoniel, de trouver la forme décisive qui mette terme à la gestation. Je ralentis encore le temps. Michèle Barange travaille la toile à plat, horizontale au sol. Sa toile est une terre, un humble jardin, un terreau. Un sol délimité entre les bras du peintre, près de ses jambes. Le peintre se penche vers ce sol si intense, si proche, rugueux, rebelle et tendre. Rétif et aimant. Voici, le peintre en fait ce temple, petit “ temenon ” : c’est-à-dire jeune enclos où du sacré affleure et afflue. Surface étrange où la vie se fait dense et soudain si volubilement présente. Plages de vie. Le geste du peintre envoûte, requiert, agite, brasse. Peindre ainsi sur et dans cette terre intense, c’est ouvrir un rite ; c’est sacraliser cette terre nôtre. Ainsi sauver la pâleur du jour et la tristesse du monde. Libérer dans son épaisseur muette une histoire. Mettre le modeste temple de ce sol en dramaturgie. La toile est le beau et lent combat du sens du destin : une solitude humaine, belle et grave comme un jeune dieu esseulé qui cherche sa phrase, sa mélodie, son profil et son nom et ne trouve rien de tout cela parce que peindre maintenant, en 2010, est mettre au grand jour le désarroi des dieux anciens, dispersés dans la confusion violente du monde. Peindre pourtant, sans relâche, chercher le sens. Beau et grave est ce geste de Michèle Barange qui cherche dans le carré de toile posé au sol un salut et un sens. Dans un monde où salut et sens sont brouillés, si ce n’est confus. Poser encore et encore sur la toile au sol la couleur et la couleur, c’est accomplir à n’en plus finir le rite d’un grand sacrifice, immémorial, qui restitue pour un court temps au monde une plénitude. On caresse avec la pâte cérémonielle le socle, on patine l’autel, le pauvre enclos sacré. On macule et macule encore avec le sang de la victime sacrificielle et on restaure pour un temps l’espoir d’une vie envisageable et la silhouette d’un sens assumable. Or voici que dans la matière, depuis peu de mois, Michèle Barange incise des traits, signes inconstitués, lettres parfois, chiffres occasionnellement ; presque une écriture. Mais une avant-écriture, l’aube du signe. En creux, le plus souvent : par incision dans la matière avec l’autre bout du pinceau, acéré. Comme une ultime cicatrice, blessure adventice et salvatrice, qui crée distance dans la géologie sacrificielle : juste ce simple trait, précisément et terriblement humain, qui signe et suspend la liturgie sacrificielle en plein murmure, en plein bourdonnement et la suspend dans une harmonie souveraine et digne où la couleur ne saigne plus et, en connaissance de cause, sourit.    

Michèle Barange : à dessein

 
Christe Jhelil, plasticienne Septembre 2005
  Châssis entoilés, peinture à l’huile, métier maîtrisé : Michèle Barange est peintre. Des gris, des ocres, des rouges : la palette entretient une étroite relation avec le jeu de la lumière ; volontairement réduite, elle se décline subtilement, en de multiples nuances dans les vibrations des franges des couches colorées méthodiquement superposées ou des failles grattées dans la surface pulpeuse. Des morceaux de couleur comme autant de moments de vie. Dans cette facture académique qui ne laisse guère de place à l’expression du hasard, pas de débordement apparent. L’oeuvre est cons.truite jusque dans la présentation composée dans un ordonnancement rigoureusement architecturé. Narrative, l’oeuvre est un carnet de voyage ; chaque toile est une page au croisement des regards de l’artiste sur le monde qui l’entoure. Dans l’intimité de l’épaisseur de la peinture, elle écrit son histoire. Mémoires gravées comme on marque les troncs d’arbres ou les vieilles pierres. Traces presque effacées comme celles qu’emporte la mer sur le sable mouillé. L’espace pictural est intemporel. Le geste est mesuré qui s’attarde dans les recouvrements comme si l’artiste tirait lentement, sur le silence du temps écoulé, voile après voile. Le geste est incisif qui s’insinue dans la matière, griffe de quelques motifs graphiques les ‘pâtes encore tendres de la couleur, des impressions ressenties, des sensations analysées. La touche suit les mêmes lois de l’opposition : tantôt lissée et calme, tantôt irrégulière, retenue ou vive. De la mesure perceptible donnée au regard sourd une nostalgie au sens noble du terme, pas de celle qui larmoie dans les replis du passé, une nostalgie source émotionnelle d’emprunt à ce qui est révolu pour revitaliser le présent, se donner, au-delà de la destruction, les moyens de (‘avenir. Michèle Barange capte les offrandes de la nature du brin d’herbe qui ondoie à la surface de l’eau à l’éclair lumineux qui effleure un instant si fugace sa toile tout comme elle s’attarde à retrouver l’impression d’une rencontre ou encore le choc de l’actualité socio-politique de notre temps. Ainsi en témoigne cette suite de récents dessins sur papier d’une poignante profondeur où, entre virtuosité et émotion, se mêlent foi et espérance dans un silence mystique que trouble une lueur immatérielle. Chaque dessin est un sanctuaire, un lieu du souvenir, frappé d’une date matricule qui résonne funestement dans les gris tragiques du graphite tourmenté : le cycle de l’histoire rattrape l’artiste depuis cet accident d’un avion qui aurait pu être le sien tandis qu’elle rentrait d’un voyage en Egypte, depuis ces autres avions un 11 septembre… Chaque dessin est une anthologie poétique.        

Michèle Barange et le peuple des signes

 
Philippe Gouët 2001
  L’homme est en exil de l’être. Ecarté, nu et solitaire, du dédale anonyme où bat, impassible, indifférent à son destin, le cœur de tout ce qui vit, il construit armé d’une patience millénaire, son royaume en un rempart de signes. Ainsi, il n’est plus vrai que les hommes ne s’éveillent que pour mourir. Ils surgissent, enveloppés de lumière et d’effroi, à la lisière d’obscures forêts, ou s’y enfoncent décidés à ne plus jamais se perdre parmi le peuple innombrable des arbres et des esprits. Au plus intime de chacun d’entre eux, d’entre nous encore, la nuit recèle le souvenir des peurs immémoriales de très anciens éblouissements ou de cécités fatales. Mais les hommes inventèrent la peau. L’œuvre de Michèle Barange témoigne d’abord de cette invention. Mais, surtout, elle rend hommage à la lente et endurante obstination des hommes à défricher les espaces, à imposer au regard vide du ciel au-dessus d’eux, les surfaces qu’ils marquent des signes de leur distinction et de leur maîtrise : la terre est une peau, mais aussi l’étendue lisse de la mer, l’écorce et la fibre des arbres, le tissu des herbes et des feuilles, les mailles invisibles des minéraux, la texture des plumes et le cuir des pelages. Par le soc et l’étrave, au couteau, au crayon et à l’encre, les hommes gravent, cisèlent, taillent, dessinent un univers de signes dont l’apprentissage et la lecture sont l’initiation nécessaire afin de pénétrer un monde devenu humain parce que, précisément, lisible. Et jusque sur la peau de leur propre corps ils portent le fer de l’incise, tatouage ou scarification, qui concentre le sens d’une distinction humaine et fière : l’homme lui-même se donne à lire. Chaque tableau de Michèle Barange est une invitation à cette lecture : l’être, immobile et lointain, comme une menace ou une promesse de liberté, surplombe et domine l’espace conquis par le jeu des signes sur la peau de la toile ; au-dessous il nous faut déchiffrer le palimpseste orgueilleux d’une humanité qui s’initie à elle-même grâce au pouvoir d’une calligraphie qui n’est autre que celle de son désir d’être. Au delà des races et des territoires, qui ne sont que de vains ou improbables fantasmes, le travail de Michèle Barange nous restitue la mémoire de notre appartenance au seul peuple qui vaille pour nous, le peuple des signes.      

Sur une dizaine de palimpsestes orangés Peintures de Michèle Barange

Yves Bergeret 1996

Les toiles orangées de Michèle Barange déploient une séduction étrange. Elles sont abstraites mais douées de la sensibilité concrète d’une terre glaise dressée vers le ciel.

Elles paraissent d’abord des relevés de fouillis d’empreintes sur un sol argileux, mélange d’une nature à la fois en gestation et en décomposition; mais ce panorama intime d’une vue plongeante sur le sol, à nos pieds, est dressé verticalement en panneaux fiers, et voilà que leur fraîcheur hardie contredit l’horizontalité placide du sol.

Epaisse paraîtrait la matière de ce sol érigé, lourde, têtue; mais en même temps les couches de cette terre argileuse sont pénétrées d’air et de lumière, si bien que chaque tableau paraît n’exister qu’en surface. De la sorte, ces tableaux offrent le spectacle de leur hésitation entre surface et profondeur.

Regardons-les encore, nous sommes intrigués. Nous sentons maintenant un mouvement dans ces empreintes argileuses : c’est celui de la lumière, d’une sorte d’excitation de la lumière, jubilante, qui remue la terre.

Est-ce bien la lumière seule qui agit ? Des masses bougent aussi, dans une rotation lourde et lente. Et l’on reconnaît bientôt, émergeant de l’épaisseur et de la mémoire, dans ce tableau un torse, dans cet autre tableau une effigie humaine, dans cet autre une momie, ici un torse encore, là un accouplement lourd de grands animaux. D’où viennent ces « figures » qui échappent à la forme ?

Ou n’est-ce pas plutôt qu’elles n’ont pas encore de formes ?

Or la plupart de ces tableaux sont composés de trois bandes, le plus souvent horizontales. Sur les trois, une se présente légèrement inaboutie, informelle, comme pour signifier une sensibilité et un « dessin » hésitants. On voit alors beaucoup mieux que ces empreintes de terre glaise insufflées de lumière, en présentant les empreintes de figures à venir, montrent le cheminement du temps.